Qingdao est une cité balnéaire chinoise de plus en plus réputée. Son premier parc aquatique, en sus du parc zoologique et de l'aquarium déjà existants, fut inauguré en mai 1995 dans un quartier en forte progression, situé au nord-est de la ville. Il s'agissait alors d'une des premières installations de ce type en Chine. Nommée Qingdao Dolphin Palace, ou parfois Qingdao Dolphin Exhibition Center, celui-ci était constitué d'un bassin principal à l'air libre entouré de plus de 2500 sièges, sur une superficie de 40 000 m².
Au début des années 2000, face au succès grandissant du lieu et à la popularité croissante de la ville, la construction d'un nouveau parc aquatique fut envisagée et un appel à investissements fut lancé. Qingdao Polar Ocean World fut inauguré le 29 juillet 2006 et obtint, dès les premières semaines d'exploitation, un fort succès.
Les installations premières du Qingdao Dolphin Exhibition Center ont pour le moment été conservées, fait rare en Chine où il est beaucoup plus courant de raser pour reconstruire à neuf. Elles sont actuellement inutilisées mais seront peut-être englobées et réutilisées dans le cadre d'une extension du Qingdao Polar Ocean World ou pour des activités estivales. Un rapide coup d'oeil sur GoogleEarth (latitude 36° 4'10.54"N & longitude 120°26'15.89"E) permet d'ailleurs d'avoir une intéressante vue aérienne des travaux pour la construction du Qingdao Polar Ocean World ainsi que de le situer par rapport aux anciennes installations.
Quelques photographies et informations recueillies par Pierre Livet lors de sa visite en août 2006 ont permis d'étayer ce compte-rendu de quelques éléments historiques.
Après s'être acquitté du droit d'entrée, le visiteur pénètre dans le bâtiment en passant sous une reconstitution de glacier. A l'intérieur, la pénombre s'installe peu à peu. Juste à droite se trouve l'accueil avec une première vue sur un des bassins des dauphins que le visiteur découvrira en fin de visite lors du spectacle. A gauche, une vaste salle circulaire est entourée de quatre bassins où évoluent plusieurs espèces intéressantes. Le premier est le lieu de vie de deux ours polaires (Ursus maritimus) et d'un ours hybride (Ursus maritimus x arctos). Leur enclos, reconstitution d'un coin de banquise, est de taille très réduite et leur bassin peu profond.
Un béluga (Delphinapterus leucas), parfois appelé bélouga ou encore baleine blanche, vit dans le second bassin visible de cette salle. Ce mammifère marin, pouvant atteindre cinq mètres de long et peser près d'une tonne, est relativement peu courant en captivité. En Europe de l'Ouest, seul L'Oceanografic de Valence (Espagne) en présente un couple ; quelques aquariums américains et japonais en possèdent également. Mais c'est sûrement la Russie qui en a de tout temps capturé et élevé le plus. Elle est d'ailleurs considérée comme un des principaux exportateurs de mammifères marins pour les aquariums et les parcs aquatiques du monde entier. Elle a fourni à la Chine près d'une trentaine de bélugas depuis l'année 2000 et le début de l'implantation florissante et exponentielle de parcs aquatiques dans ce pays.
Le Qingdao Polar Ocean World s'est procuré en 2006 quatre bélougas. Deux individus furent installés dans le bassin précité et les deux autres dans le grand bassin de spectacle pour participer aux animations quotidiennes. Malheureusement, mi-janvier 2007, un des quatre bélougas, une femelle nommée Tina et âgée de cinq ans, développa des abcès cutanées et des ulcères sur sa nageoire caudale. Plusieurs articles de presse furent alors publiés et accompagnés d'impressionnantes photographies d'amputation d'une partie de la nageoire. Dans ces écrits, l'équipe dirigeante reconnaissait également son manque d'expérience par rapport à ces animaux et souhaitaient faire appel à des experts. Malheureusement, la presse ne relata pas la suite des événements. Lors de ma visite le 1er février 2007, je n'ai pu observer que trois bélougas, un au début de la visite dans la salle circulaire et deux autres lors du spectacle. Tina a-t-elle finalement succombée à sa maladie ? A-t-elle été transférée dans un autre parc aquatique pour des soins prolongés ?
Le troisième bassin de cette première salle est occupé par trois otaries de Steller (Eumetopias jubatus), un mâle et deux femelles. Cette espèce est la plus grande des otaries, les mâles pouvant atteindre 700 kilogrammes, voire même plus. Elle est relativement peu représentée en captivité ; en Europe, un groupe reproducteur vit au Dolfinarium Harderwijk (Pays-Bas). Une loutre de mer (Enhydra lutris) vit dans le quatrième bassin. Il s'agit là encore d'une autre espèce rare, présente uniquement dans trois zoos européens. Le plafond au centre de la salle est vitré et permet d'avoir un premier aperçu du bassin des manchots, situé au second niveau que le visiteur atteint par un long escalier. Une petite salle de cinéma se trouve alors à gauche.
Arrivé au second niveau, le visiteur a une nouvelle vue, cette fois plongeante, sur l'enclos des ours. Le bassin des bélougas est également accessible et entouré d'une petite plage où les visiteurs sont invités à venir nourrir les animaux, en saison touristique.
L'installation des manchots, en forme du symbole yin, se trouve également à cet endroit. Elle est de conception relativement innovante ; de la vraie neige recouvre également les parois rocheuses où évoluent les animaux. Quatre espèces de manchots parmi les 17 existantes sur la surface du globe sont présentées au Qingdao Polar Ocean World. Il s'agit des trois espèces du genre Pygoscelis et une espèce de gorfous. Des gorfous huppés (Eudyptes sclateri) sont également cités sur les panneaux d'identification, mais je n'ai pu observé aucun oiseau appartenant à cette espèce lors de ma visite.
Les manchots d'Adélie (Pygoscelis adeliae), mesurant environ 70 cm, sont reconnaissables à leur tête noire et leurs yeux cerclés de blanc ; c'est une espèce rare en captivité. Les manchots papous (Pygoscelis papua) possèdent un bec orange et une tache blanche au-dessus de l'oeil ; ils mesurent environ 80 cm. En Europe, d'importantes colonies sont présentées à à Édimbourg (Royaume-Uni) et Odense (Danemark), en sus de quelques individus dans une dizaine d'autres zoos. Les manchots à jugulaire (Pygoscelis antarcticus), facilement reconnaissables à leur fine bande de plumes noires autour du menton et de la gorge, mesurent environ 75 cm et sont très rares en captivité. Parmi les sept espèces du genre Eudyptes, le Qingdao Polar Ocean World présente des gorfous sauteurs (Eudyptes chrysocome) ; il s'agit du plus petit des gorfous, d'une taille d'environ 50 cm.
Qingdao Polar Ocean World cherche également à recréer un ensemble complet sur la vie polaire, en évoquant également les hommes qui ont traversé ou occupé ces territoires particuliers. Plusieurs reconstitutions et expositions miniatures vont dans ce sens. La première est constituée de plusieurs engins de déplacement utilisés aux pôles ; des tentes et combinaisons modernes ainsi que des outils courants sont également présentés. La plus impressionnante reconstitution est sûrement celle du galion qui émerge au centre du bâtiment et domine, d'une part, le bassin des bélougas et, d'autre part, celui des pinnipèdes que nous décrirons plus loin. Un groupe d'Inuits présente quotidiennement des animations à propos de leurs cultures et de leurs chants traditionnels, à l'instar des anciennes exhibitions anthropologiques en Occident. La visite se poursuit par la découverte d'un drakkar viking puis une reconstitution de fortifications avec canons et drapeau pirate.
A cet endroit, le visiteur trouve plusieurs boutiques et points de restauration divers. Les enfants sont également à l'honneur avec une salle particulière où ils sont invités à dessiner leurs impressions.
Après ces différentes digressions culturelles et culinaires, le visiteur retrouve la faune marine avec un premier bassin de contacts où évoluent de jeunes tortues vertes (Chelonia mydas) et des limules. A droite, un impressionnant bassin est le lieu de vie de près d'une trentaine de pinnipèdes appartenant à cinq espèces : otarie à fourrure du nord (Callorhinus ursinus), lion de mer de Californie (Zalophus californianus), lion de mer austral (Otaria byronia), phoque veau marin (Phoca vitulina) et phoque gris (Halichoerus grypus). L'otarie à fourrure du nord est la seule espèce du genre Callorhinus, dont le nom est d'ailleurs emprunté au grec et signifie "belle peau" ; il s'agit d'un animal très peu courant en captivité.
Les pinnipèdes présentés à Qingdao m'ont paru, pour la plupart, être des juvéniles. De nombreux conflits semblent courants au sein du groupe et prouvent toute la difficulté de maintenir un tel groupe mixte. N'aurait-il pas été plus judicieux de présenter une seule espèce en groupe reproducteur ?!
Il est également proposé aux visiteurs de nourrir les animaux de petits poissons achetés à un stand voisin.
Une reconstitution de requin pendu par la queue est installée sur le ponton qui borde le bassin et est accompagnée d'un panneau rappelant les pêches excessives perpétuées couramment. Il s'agit peut-être d'un début de prise de conscience dans un pays encore fort habitué à la consommation de divers mets préparés à base de requins. Avant de rejoindre le niveau inférieur, le visiteur trouve encore un petit bassin, inoccupé lors de ma visite en février 2007, mais où vivaient à l'inauguration trois jeunes morses.
En empruntant une rampe électrique, le visiteur retrouve le niveau inférieur où il a débuté sa visite. Les couloirs sont sombres et l'atmosphère totalement différente de celle du niveau supérieur. Juste après la descente, à gauche, le visiteur découvre quelques hublots qui permettent d'avoir une première vue sous-marine du bassin des pinnipèdes. Le bac suivant est un immense anneau d'un diamètre interne d'une douzaine de mètres où a été recréée une barrière de corail avec la faune particulière qu'elle abrite.
En face d'une salle informatique se trouvent deux grands bacs. Dans le premier vivent des poissons de la famille des fistulariidés. Constituée d'un unique genre, Fistularia avec trois ou quatre espèces, celle-ci englobe d'étranges poissons des mers tropicales, au nez très allongé et apparentés aux poissons-trompettes et à l'hippocampe ; les plus grands d'entre eux peuvent atteindre deux mètres. De nombreux coraux et petits poissons tropicaux sont présentés dans le second bac.
Le visiteur est ensuite invité à traverser le bassin des pinnipèdes par l'intermédiaire d'un large tunnel de verre. Une colonne d'eau, qu'empruntent parfois les animaux, se trouve également à cet endroit.
La visite se termine par une dernière galerie où sont aménagés neuf petits bacs. De nombreux poissons d'origines diverses y sont présentés dont des nasons à éperons oranges (Naso lituratus), des picots renards (Siganus vulpinus), des poissons vaches (Lactoria diaphana), des Centriscus scutatus, des Plectorhinchus sp., des Gymnothorax sp., des poissons papillons, des poissons chirurgiens, des balistes, des rascasses... Une quinzaine de tortues vertes (Chelonia mydas) évoluent dans un bassin, une trentaine de requins dans un bac voisin. La plupart sont des requins taureaux (Carcharias taurus), des requins à pointes blanches (Triaenodon obesus) et des requins zèbres (Stegostoma fasciatum) ; des rémoras (Remora sp.) et des raies (Taeniura sp.) y cohabitent également.
Le visiteur accède ensuite à la seconde partie du bâtiment où se trouvent les bassins de spectacle. Plusieurs boutiques et un autre point de restauration sont également aménagés à cet endroit. Un accès direct permet de retrouver le début de la visite et la première salle circulaire.
Les animations quotidiennes, d'une durée approximative d'une trentaine de minutes, font intervenir successivement deux bélougas (Delphinapterus leucas), huit grands dauphins (Tursiops truncatus) et quatre lions de mer de Californie (Zalophus californianus). Les dauphins du Qingdao Polar Ocean World possèdent des zones sombres sur leurs corps assez caractéristiques pouvant les rapprocher du grand dauphin de l'océan Indien (Tursiops aduncus). La confusion entre les deux espèces est courante et l'identification pas toujours aisée ! De plus, plusieurs parcs aquatiques asiatiques présentent en spectacle depuis plusieurs années des grands dauphins de l'océan Indien.
Les animations du Qingdao Polar Ocean World sont malheureusement peu axés sur la pédagogie ou les caractéristiques des animaux présentés. Il s'agit surtout de tours spectaculaires et peu naturels durant lesquels le visiteur est malheureusement trop souvent invité à participer.
Le bassin central est bordé de six bassins circulaires de plus petite taille où sont maintenus les animaux entre les spectacles.
Après avoir assisté au spectacle, qui a lieu plusieurs fois par jour à des horaires définis, le visiteur peut trouver la sortie du bâtiment en traversant la plus grande des boutiques.
En conclusion, Qingdao Polar Ocean World, vaste parc aquatique commercial, a dû représenter un investissement conséquent. On peut regretter certains des choix qui ont été faits mais surtout la conception de certains bassins et installations. Dès l'inauguration, la collection animale s'est avérée variée et constituée de grandes raretés zoologiques, la question de la provenance de tous ces individus pouvant très rapidement se poser. Qingdao Polar Ocean World est aussi une illustration, parmi tant d'autres, de l'importante prolifération de ces parcs aquatiques en Chine, tout comme les safaris et autres parcs d'attractions il y a quelques années déjà.
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