Futur zoo de Pessac : le choix est fait

[okapi]

Certes, c'est juste qu'à grande agglomération, on associe volontiers grand zoo… Question d'image sans doute et un joli petit conservatoire dédié à la biodiversité n'aura malheureusement jamais le même impact auprès des édiles et du public qu'un vaste parc rempli de girafes altières, d'éléphants débonnaires et de lions rugissants… Il y a une franche inadéquation entre les enjeux et le résultat, surtout compte tenu des ambitions de SAVE… Nous sommes très heureux d'avoir un Musée Delacroix et une Maison de Victor Hugo, mais l'impact du Louvre ou d'Orsay sont sans commune mesure pour l'image de la ville: Juppé pensait sans doute à la même chose en soutenant le projet. Images et retombées sont essentiels sur l'échiquier politique et le plus joli petit zoo du monde ne sera jamais à la hauteur symbolique d'un parc comparable aux grands établissements de l'Hexagone. Après, évidemment, c'est une question de choix.

[raphaël]

Grande agglomération grand zoo ?
Où est ce le cas en France, à part Vincennes et à la limite, Montpellier ?
C'est un système très marqué en Allemagne, où chaque grande ville a son parc, mais en France, nous n'avons pas ce système.
Le zoo est vu comme un lieu de distraction de vacances ou de dimanche, où les gens vont quand justement ils sortent de la ville pour aller vers la campagne. Saint-Aignan ou Les Mathes sont loin d'être des grandes communes.
Et malheureusement, les porteurs politiques du projet de Save, dont Juppé, voyaient plus les retombées touristiques et économiques que le prestige scientifique de l'entreprise...

[Philippe]

Le coût de l'abandon du parc animalier de Pessac

Abandon ou ambition à la baisse ? Le projet initial de parc animalier de Pessac à 41 millions d'euros ne devrait jamais voir le jour.

Alain Juppé, président de la communauté urbaine de Bordeaux, et Franck Raynal l'ont enterré. « Trop coûteux en subvention et ne s'appuyant pas assez sur le privé », n'a cessé de répéter le nouveau maire (UMP) de Pessac. Son abandon coûtera cher à cause du montage du projet.
En effet, trois partenaires, la Caisse des Dépôts, la Saur et la Caisse d'Epargne, devaient détenir une part minoritaire de la SEM Zoo de Pessac, qui était délégataire du projet pour le compte du Syndicat mixte pôle touristique du Bourgailh (SMPTB). « Il est probable qu'ils vont demander le remboursement de leurs parts qui se montent à 800.000 euros. Une somme à laquelle il faudra probablement ajouter des dédits qui seront versés à certains prestataires », estime Raphael Dupin, le directeur général de la SEM.

Si aucun travaux n'avait été lancé, 1 million d'euros d'études ont en outre déjà été dépensés pour ce projet ambitieux qui s'étendait sur 18 hectares et visait 300.000 visiteurs par an. La mairie envisage désormais un projet beaucoup plus modeste avec un parc ludique, un jardin botanique, des terrains de sport, des jeux pour les enfants pour un investissement d'environ 3 millions d'euros.

Source : Les Echos.

[okapi]

Dommage, vraiment… Nous avons là un beau cas d'école d'oscillation entre vision et anticipation et pur clientélisme… Le zoo était un projet d'envergure régionale sinon nationale et le parc de loisirs est essentiellement local… C'est un choix, discutable, mais respectable dans ce qu'il révèle en matière de sens politique…

[raphaël]

Tu vois okapi, le problème des politiques publiques : il suffit qu'un projet soit lancé par un bord politique, pour que l'autre bord soit contre.
Soyons honnêtes, la création d'un grand zoo, c'est pas spécialement de gauche. Ni de droite. La preuve, Juppé (de droite) et les villes de Pessac et Mérignac (de gauche) portaient le projet.
La vérité, c'est que partout, nos petits élus municipaux veulent "leur" projet. Et si le nouveau maire ne veut pas mettre l'argent dans un zoo, mais dans une salle de sport, ou de spectacle, alors il arrête tout. Et le prochain maire voudra peut être son rond point ou son skate parck...
Donc là, après des années de dossiers, d'enquêtes, et de trucs qui ont dû coûter un pognon fou mais personne ne regarde parce que c'est l'argent public, on abandonne un projet bien lancé. Abandon qui lui aussi va coûter beaucoup d'argent... Pour finir avec des balançoires et bacs à sables.

Comme quoi, et Durrell et Pierre Gay le disaient avant moi, la motivation et la volonté d'un petit nombre de personnes "privées" font beaucoup plus que la lente et lourde machine publique...

[bastet_75]

Au delà de ça je crois que la France vis des jours particulièrement difficiles, et que les Maires élus ont pour la plupart fait campagne sur des questions budgétaires et de pouvoir d'achat. A peine élu, devoir augmenter les impôts pour financer un tel projet dont les retombées ne se feront pas dans l'immédiat est plutôt difficile à faire avaler aux habitants des villes concernées je pense.

[éric13]

C'est peut-être aussi ce qu'on doit attendre d'un politique !
Qu'il soit visionnaire, ambitieux de porter un projet qui devrait ± nécessairement avoir des retombées sur l'emploi et l'attraction touristique locale puis suffisamment courageux pour asseoir son autorité...

bref qu'il en ait !

Maintenant, le projet était éventuellement pantagruélique, il aurait pu être réviser à des mesures moins coûteuses avec la possibilité d'une extension si le besoin s'en était fait sentir dans un avenir + lointain.

Là, c'est claqué quelques millions pour rien.

[okapi]

On parle ici de politique municipale, pas d'un projet d'état. C'est donc une vision très précise qui est en jeu: satisfaire une clientèle immédiate en créant des terrains de jeu et des équipements de loisir qui permettent de se dédouaner sur le reste, le tout à moindre coût que le projet initial, avec un profit local quasi nul en retombées économiques, mais avec une visée très clientéliste à effet immédiat. Le projet d'un "grand" zoo dans cette agglomération n'est pas absurde puisqu'il prend la relève d'un parc ancien et il est surtout très ambitieux en termes de retombées électorales, politiques et économiques. Le propos n'était pas terrible, mais ça reste un équipement culturel et scientifique d'une plus grande portée que des balançoires et des terrains de foot. Cela posé, il y aura aussi beaucoup d'électeurs très heureux d'avoir une base de loisir à leur disposition et qui sauront se contenter d'un petit zoo local. C'est un choix municipal, très ancré dans le quotidien, très lié à un homme et un programme politique.

[Teddy123]

D'accord. Vous avez raison.

[giradaire]

En complément, un interview du directeur actuel.

Raphaël Dupin, actuel président du zoo de Pessac et le porteur du projet Save en tant que directeur général de la société délégataire, ne cache pas sa déception après l’abandon, officialisé ce jeudi, de ce projet de grand parc animalier au Bourgailh. Entretien.

Raphaël Dupin y croyait. Le projet Save, porté par le directeur du zoo de Bordeaux-Pessac, était sur les rails et sa réalisation sur le point d’être lancée. Mais l’arrivée de Franck Raynal (UMP) à la mairie de Pessac, qui avait fait campagne contre, a tout changé. Alain Juppé, président de la Communauté urbaine de Bordeaux, a planté ce jeudi le dernier clou dans le cercueil de Save, en annonçant que la Cub ne financerait pas ce nouveau parc animalier. Le maire de Bordeaux avait pourtant voté pour en tant que vice-président en 2013.

Rue89 Bordeaux : Quelle est votre réaction à l’abandon du projet Save ?

Raphaël Dupin : C’est à la fois une grande tristesse et le sentiment d’un énorme gâchis. C’est un beau projet qui avait tout pour aller jusqu’au bout, il était sur de bons rails. C’est le travail de plusieurs équipes qui est mis à la poubelle, que ce soit l’équipe actuelle du zoo ou l’équipe de conception : les architectes, les paysagistes, les zoologues… Et le travail de ceux qui se sont investis pour proposer un projet enthousiasmant pour tout le monde : collectivité, partenaires privés, visiteurs et bien sûr les animaux.

C’est un projet porté par les élus depuis le début des années 2000. Il a pris une forme définitive début 2012, suite à un appel d’offre lancé par les collectivités où deux regroupements d’entreprises ont répondu. Les collectivités ont choisi de retenir le zoo de Pessac pour réaliser le futur projet Save en juillet 2013. Depuis, on a travaillé et on en était au stade du permis de construire, de façon à débuter les travaux en 2015 et ouvrir en 2017.

C’est donc un projet que les pouvoirs publics ont d’abord voulu et voté ?

Le Syndicat Mixte Pôle Touristique du Bourgailh a délibéré en juillet 2013 sur l’attribution d’un contrat de délégation de service public sur 25 ans. Il fallait ensuite réunir des financements des collectivités publiques partenaires. Le coût global du projet est de 40 millions d’euros (pour information la réhabilitation du zoo de Vincennes a coûté 160 millions d’euros). Sur le budget global de Save, 22 millions étaient à prendre en charge par les collectivités : 7 millions par la Région Aquitaine, 7 millions par la ville de Pessac et 8 millions par la Cub.

Après délibération, la Région a voté en faveur du projet, la ville de Pessac également et l’a inscrit dans ses dépenses. La Cub a aussi délibéré favorablement pour ce projet lors d’un vote avec une seule voix contre, celle de Franck Raynal, l’actuel maire de Pessac. Alain Juppé, alors vice-président, a voté pour. D’où notre vraie surprise aujourd’hui face à l’abandon du projet.

Je tiens à préciser que dans le modèle économique de Save, les collectivités retrouvaient leurs investissements sous forme de redevances sur la durée du contrat.

Quelles sont les conséquences de l’abandon de ce projet au niveau financier ?

En tant que délégataire, j’ai engagé des contrats de conception avec des équipes d’architectes, de paysagistes et de maîtrise d’œuvre. Il va falloir rompre ces contrats, ce qui peut conduire à des contentieux et donc des indemnités de rupture de contrats. Il est difficile de chiffrer le montant, mais c’est en centaines de milliers d’euros.

Par ailleurs, il est vraisemblable que les actionnaires privés de la société délégataire (Caisse des dépôts, Caisse d’Epargne et le groupe Saur) fassent valoir leurs droits de retrait et exigent le rachat de leurs parts par la ville de Pessac et la Cub pour une somme d’environ 850 000 euros.

Quels étaient les points forts du projet ?

Le zoo de Pessac est la première attraction familiale non subventionnée sur la Cub. L’abandon de son évolution est regrettable, d’abord parce qu’on était sur le point de réaliser un des plus beaux zoos d’Europe. On avait l’avantage de concevoir un zoo sur un terrain vierge, en y mettant tout ce qui se fait de mieux actuellement pour remplir les missions d’intérêt général qui sont celles d’un zoo.

Un zoo, ce n’est pas juste mettre des animaux en captivité. Il doit bien sûr répondre à sa fonction de structure de loisir familial, mais c’est aussi une structure qui a plusieurs missions : le développement économique, car le projet Save était sur le point de créer 40 emplois en CDI et 20 emplois saisonniers, sans compter la centaine d’emplois indirects ; la conservation, car nous allions accompagner une vingtaine d’associations locales de défense de l’environnement, avec un budget de 300 000 euros par an consacré à la conservation de la biodiversité en Aquitaine ; la pédagogie avec des outils numériques pour sensibiliser le public aux problèmes de la biodiversité ; enfin, la recherche, via des partenariats avec des laboratoires des universités bordelaises et des entreprises privées.

Dans l’état actuel, le zoo de Pessac ne peut pas remplir ces missions. C’est un zoo vieillissant qui a besoin, pour perdurer, d’un fort investissement de remise aux normes. Mais cela ne nous empêche pas cette année d’enregistrer 25% de croissance. Il y a plus de 100 000 visiteurs payants, dont 20 000 Pessacais.

Le zoo est à vendre ?

Nous ne sommes pas au courant.

Rien à dire sur cette question ?

Il faut faire attention avec ce projet de revente. Il faut que l’hypothétique acheteur ait un vrai projet de développement pour améliorer les missions d’intérêt général, les infrastructures, les conditions de travail…

Source: Rue89 Bordeaux

[okapi]

N'y aurait il pas une certaine forme d'ambivalence dans la dernière question et sa réponse?

[giradaire]

En complément un interview du Président du Conseil Régional d'Aquitaine (partie SAVE)



Source: Le quotidien SUD-OUEST du 10.10.2014

[raphaël]

Il dit beaucoup de ...nneries quand même...

Les plus grands zoos sont publics, c'est bien sûr faux, que ce soit à échelle française ou internationale. Le tout nouveau Vincennes rehausse le prestige des zoos nationaux, mais sinon, tous les grands zoos très visités sont privés.
D'ailleurs je n'aime pas du tout la raison qui justifie tout le projet, en première phrase "ça va créer 40 emplois". Dieu que cet argument est insupportable, car en temps de crise, on justifie tout par l'emploi. Un nouveau stade, une autoroute inutile, un élevage de crocodiles, tout ça crée des emplois, c'est formidable !

Enfin, dire que le zoo actuel sur 4ha ne vaut rien est faux. Bien sûr, sur 12 ou 16 ha, ça serait mieux, mais faire un tout petit et bon zoo est possible. Regardez les Sables d'Olonne.

[okapi]

Si on considère Berlin, New York, Londres, Anvers, Vienne, tous les parcs dont le nom est associé à "Metropolitan", "County" et "National", ceux gérés par une ONG ou un trust comme des établissements privés, alors oui, tous les plus grands zoos sont "privés"!
La question de la superficie est évidemment un argument économique: un grand zoo génère mécaniquement plus de revenus puisqu'il est bien évident qu'il attire plus de monde en vertu de l'adage: plus c'est imposant, mieux c'est… Un petit zoo, c'est charmant, mais ça ne fait pas sérieux pour un élu qui vise un parc à grande échelle! Et le plus grand zoo français est bien public: la Haute Touche n'a pas de rival en termes de superficie…

[Vinch]

C'est vrai que 400 hectares pour la Haute-Touche, il n'y a pas de rivalité à ce niveau.
Mais, à 50 km de là, se trouve Beauval, avec bien plus d'espèces animales (dont le Panda Géant!), bien plus de point-bouffes et tout le tralala...