Mercredi 20 décembre 2006,
Huit bébés dragons de Komodo devraient éclore prochainement au zoo de Chester (Royaume-Uni) d'oeufs pondus par une femelle vierge, Flora: ces reptiles sont capables de se reproduire par autofécondation, révèlent des biologistes dans la revue Nature de jeudi.
Originaires de la petite île indonésienne dont ilsportent le nom et de quelques autres terres volcaniques voisines, menacés d'extinction, les dragons (ou varans) de Komodo sont les plus gros lézards du monde, pouvant dépasser les trois mètres.
En captivité, ils font l'objet d'un programme international d'élevage, lancé en 1998 au parc animalier français de Thoiry (Yvelines). Dans le cadre de cette coopération, quatre premiers varans ont vu le jour en mars 2006 au zoo de Londres, sortis d'oeufs pondus par Sungaï, ancienne pensionnaire de Thoiry mais envoyée outre-Manche afin d'éviter une union consanguine avec son compagnon et cousin Kinaam, lequel s'est retrouvé à Chester.
Ainsi, pendant deux ans et demi, Sungaï et Kinaam ont dû faire chambre à part. Mais dès son arrivée au zoo du Regent's Park et avant de rencontrer son nouveau partenaire, Raja, la femelle a pondu des oeufs fécondés, dont allaient éclore (malheureusement après la mort de leur mère), dans un incubateur, les quatre premiers bébés "européens".
Comment cela a-t-il pu se produire alors que l'incubation, après fécondation, dure normalement huit mois environ? Le mystère était total, mais Phillip Watts, de l'université de Liverpool, et ses collègues, viennent de l'élucider selon leur article publié par la revue scientifique britannique.
Les "dragonnes" de Komodo, ont-ils découvert en analysant l'ADN extrait de trois oeufs couvis (pourris) parmi les onze oeufs fécondés d'une ponte de 25 faite par Flora, pratiquent parfois ce qu'on appelle la parthénogénèse: elles s'autofécondent et produisent, en quelque sorte, des clones d'elles-mêmes. L'éclosion de huit bébés issus de cette immaculée conception est attendue en janvier 2007.
Quant à Sungaï, les scientifiques ont constaté que ses quatre premiers bébés sont dus eux aussi à la parthénogénèse, tandis qu'un autre, sorti de l'unique oeuf viable de six qu'elle a pondus deux mois après avoir copulé avec Raja, est le fruit de ce rapport sexuel.
"La parthénogénèse constitue donc un phénomène non reconnu jusqu'ici pour la gestion génétique des populations menacées", notent les chercheurs. Ils se demandent toutefois si cette reproduction monoparentale ne peut conduire à la naissance d'individus de forme physique réduite et à un plus grand risque d'extinction, bien que les quatre rejetons de Sungaï soient sains et qu'ils croissent et se comportent normalement.
Chez les dragons de Komodo sauvages, la parthénogèse pourrait constituer une bouée de sauvetage, permettant à une seule femelle, non fertilisée, de fonder une colonie au sein de laquelle la reproduction sexuelle peut reprendre par la suite mais, il est vrai, entre individus apparentés. A peine 4.000 dragons de Komodo survivent dans la nature dont peut-être moins de 1.000 femelles adultes.
