À Metz, on parle beaucoup des animaux, mais on ne sait pas ce qu’ils vivent. Alors, on en a interrogé cinq. Aujourd’hui, l’ours polaire d’Amnéville.
Ce matin, je n’ai pas envie. Elle peut m’appeler tant qu’elle veut, Julie, ma soigneuse, je ne bougerai pas. Pas envie de sortir de mon coin, pas envie de me baigner, même pas envie de me montrer aux touristes. Non.
Je les entends passer. Ils s’installent sur les gradins, ils tapent à la vitre, ils lisent mon prénom à haute voix : Olaf. Ils guettent. Julie m’appelle encore. Je sais bien que je suis une des attractions du zoo, censé apparaître à l’ouverture, à 9h30. Mais, ce matin, non, vraiment pas.
Il faut dire qu’avec mon frère Tromsø, on est là depuis dix-sept ans. On est quasiment parmi les vétérans du site. On a 29 ans, on est des ours tranquilles. Enfin, pas des nounours non plus. Personne ne s’amuserait à poser un pied dans l’enclos en notre présence, ça finirait mal. D’après Julie, Tromsø est même un peu vicieux, à guetter la porte ouverte, l’imprudence, pour se faire la belle.
On a beau être nés tous les deux en captivité aux États-Unis, être arrivés à Amnéville via l’Allemagne, il doit nous rester quelque part le goût des grands espaces blancs et de la chasse. Ici ? C’est différent. Pour la taille de l’enclos, rien à dire, on est plutôt gâtés. Mais le poisson arrive congelé, et même si Julie camoufle des morceaux de bœuf ou de poulet sous la cascade ou les arbres, c’est quand même un peu plus pépère que la vie sauvage. Il y a même des seaux de légumes, c’est dire. Vous croyez que mes confrères du pôle Nord tournent aux poireaux-carottes ?
Ce qui nous assure aussi notre longévité, notez bien. Parce que sur la banquise fondante, un ours polaire ne dépasse pas les dix ans d’espérance de vie. Ici, on nous dorlote et on nous soigne ! J’ai eu des kystes osseux aux coudes, on m’a opéré en février. Pour me soigner, on a mis au point du médical-training : un poisson pour me rapprocher de la grille, un autre pour me faire me redresser, un dernier pour que j’accepte le désinfectant, envoyé par brumisateur, et le nettoyant, posé au bout d’un bâton ouaté long comme un balai. Un régime efficace en tout cas. Je n’ai plus mal aux coudes et je suis passé de 420 kg à 520 kg en un an ! La forme ! Tromsø, lui, est un poids-léger, à 350 kg.
Bon, j’ai roupillé mes vingt heures. Il y a des glaçons dans le bassin, mon public m’attend. J’y vais. Sinon les macaques et les calaos voisins vont encore se moquer.
Le zoo d'Amnéville héberge depuis 2008 deux ours polaires, Tromsø et Olaf, anciens animaux de cirque.
Source :
Le Républicain Lorrain.
J'ai rarement vu un numéro avec des animaux aussi impressionnant !
