1ere visite à la vallée, mes commentaires et photos

[Philippe]

A Nesles, le principe de ces animateurs circulant à la rencontre des visiteurs fonctionne toute l'année.

[okapi]

Je crois que Gibbon a mis en évidence un point saillant: s'agit-il de répondre aux questions des visiteurs ou de délivrer un message conservatoire? Bien sûr, les deux peuvent se mêler, mais je pense que l'essentiel n'est pas d'informer le public sur le nombre de croquettes ingurgitées par Titine ou sur le mauvais caractère de Juju (je n'invente rien, évidemment), mais de prendre le prétexte de ces pauvres bêtes enfermées pour faire prendre conscience que leurs cousins libres ont besoin d'aide. En fait, l'animation devrait se terminer par une quête!
Ce que je pense, mais cela n'engage que moi, c'est que les animations à base de pommes et de laitues sont un aveu d'impuissance. Nourrir six fois par jour les singes au titre de l'enrichissement, c'est une blague! C'est surtout pour attirer le public, l'occuper dix ou quinze minutes là où il en passerait deux et donner l'illusion d'un contact privilégié avec la caste mystérieuse des soigneurs. Mais ça favorise surtout une dépendance des animaux vis-à-vis de la distribution normée et je continue de croire qu'un territoire qui ne se suffit pas à lui-même pour occuper et faire vivre les bêtes qu'il contient est un mauvais territoire. "Occuper les animaux": vous imaginez ce que cela signifie en creux? Leur donner à manger à heures fixes pour les "enrichir", créer une "activité", sérieusement qui ici croit encore à une vision désintéressée du phénomène?
La force d'une médiation, c'est peut-être d'être capable de la mettre en oeuvre SANS l'animal et surtout sans être obligé de le faire se dresser sur ses pattes pour attraper la banane...

[raphaël]

Là tu te trompes okapi, l'enrichissement du milieu est une problématique importante prise en compte par de nombreux spécialistes partout sur la planète, des éthologues et des universitaires réputés. Le fractionnement des repas est une action unanimement reconnue comme bénéfique. Au lieu de servir une gamelle pleine le soir engloutie en trente secondes, servir cinq, dix petits repas par jour à différents moments occupe bien mieux les animaux. Exemple toujours de Romagne, à chaque animation le singe attrape son endive, la décortique, l'effeuille, la croque. C'est une façon, certes lointaine, de recréer l'activité quotidienne des primates qui est composée en grande partie de la recherche et consommation de nourriture.
Alors, non ce n'est pas une "blague"... D'ailleurs, les animaux ont les mêmes repas hors saison quand le parc est fermé au public.
De toutes façons, même avec un territoire riche en sollicitations (comme le sont d'ailleurs les îles et les forêts de Romagne), on ne pourra jamais nourrir uniquement les bêtes avec les glands et les mûres locales. Il faut bien les nourrir à un moment, alors autant le faire de façon fractionnée.

Le repas des animaux est un prétexte. Certes, on pourrait imaginer des points rencontre durant lesquels les visiteurs pourraient discuter avec l'animalier, mais comme le dit Okapi et gibbon, la discussion tournerait plus autour des individus présents. Avec le nourrissage, en effet le public est "retenu", il attend la fin, que l'animateur lance des derniers morceaux de légumes. Le plus souvent il regarde les animaux sans écouter forcément tout le message derrière, mais il est quand même là, et réceptif. De plus, les gens se trompent souvent sur le régime alimentaire des animaux : on pense bananes au lieu de légumes, on pense viande pour le loup à crinière, etc. Sans compter pour les espèces sociales la répartition spatiale intéressante, monsieur gorille domine, telle femelle attend en retrait, etc. Il y a plein d'infos intéressantes à relever d'un nourrissage.

[Philippe]

Je pense que l'essentiel n'est pas d'informer le public sur le nombre de croquettes ingurgitées par Titine ou sur le mauvais caractère de Juju (je n'invente rien, évidemment), mais de prendre le prétexte de ces pauvres bêtes enfermées pour faire prendre conscience que leurs cousins libres ont besoin d'aide.

C'est en effet là tout l'enjeu !

[okapi]

Non Raphaël, je ne me trompe pas, mais justifier le lancer de nourriture comme un enrichissement, c'est pour moi une plaisanterie! L'enrichissement, et on revient de loin, je te l'accorde, c'est l'absence d'intervention humaine. On est passé d'une cage cimentée à des enclos de plusieurs hectares: c'est là que réside le véritable enrichissement!
On spectacularise un processus naturel pour l'animal: se nourrir. Bien sûr qu'on ne va pas compter sur un lapin de passage pour sustenter les fauves et que les feuilles et les glands ne vont pas servir à gratifier les singes! Mais je ne vois pas en quoi ces moments devraient être transformés en prétexte à faire s'attrouper les visiteurs! Encore une fois, la médiation devrait s'effectuer sans obligation pour l'animal d'être là, en train de quémander un fruit ou un légume.

[gibbon]

Maintenant, je maintiens que, même avec du personnel supplémentaire en été, un soigneur-animateur qui continue à assurer ses responsabilités (même allégées) de soigneur ne peut passer son temps à répondre aux questions ni aller à la rencontre du visiteur, approche choisie par le Parc des félins et qui me paraît aussi originale que pertinente.

Lors des fortes affluences (quand le public à sensibiliser est donc le plus nombreux), impossible pour un soigneur - dont les journées sont déjà longues et bien remplies - de répondre à toutes les questions des visiteurs croisés dans les allées ou, mieux encore, d'aller à leur rencontre pour en sensibiliser le plus grand nombre possible.
D'où, à mon sens, l'utilité d'animateurs formés aux principes de la pédagogie et connaissant très bien les pensionnaires d'un établissement dont ils sont les salariés et dont la mission consiste notamment, comme cela se pratique à Nesles, à sillonner l'établissement afin de sensibiliser le plus large public possible en allant au-devant de celles et ceux qui n'assistent pas aux animations, qui n'osent pas prendre la parole et interroger un soigneur devant d'autres visiteurs etc. etc.

Réponse aux parties en gras:
Justement pas, puisque les animateurs tout court ne connaissent que peu de choses sur les pensionnaires du parc, à la différence des soigneurs ou des des soigneurs-animateurs qui eux les côtoient tous les jours et sont au fait des moindres événements concernant leur santé, les liens de parentés, les arrivées, les départs, l'alimentation au parc, etc..., en gros les choses que concernent la plupart des questions des visiteurs.

Réponse aux parties soulignées:
Les visiteurs à sensibiliser sont certes nombreux, mais la plupart ne s'intéresse même pas à la façon de vivre des animaux dans la nature (leur rythme de vie, leur alimentation, leur biotope ou répartition géographique), alors espérer qu'ils s'intéressent aux menaces et aux problèmes environnementaux relève du rêve... Il faut quand-même bien se rappeler que le grand public vient au zoo avant tout pour se divertir et pas pour apprendre!

[didier]

les animateurs tout court ne connaissent que peu de choses sur les pensionnaires du parc

C'est faux pour le parc des félins qui est un cas particulier, il y a un nombre restreint d'espèces et d'animaux, et les animateurs qui sont là depuis des années, connaissent parfaitement leur sujet.

[gibbon]

Les animateurs ne sont pas là depuis des années. L'équipe des animateurs saisonniers, qui sont en gros ceux que 90% des visiteurs rencontrent pendant leur visite, change chaque année. Et le "sujet" dont on parle, qui est bien la connaissance des pensionnaires du parc, ils ne peuvent, rien que pour cette raison, bien le connaître...

[okapi]

C'est sûr que le gros des visiteurs se fiche d'à peu près tout, hormis de pouvoir cogner sur les vitres pour inciter le boa à faire un saut périlleux ou à hululer en choeur devant les loups! Mais cela dit, je pense qu'un animateur bien formé saura mieux gérer les questions embarrassantes qu'un soigneur souvent trop impliqué dans la vie du parc. Il y a parfois, et il y en aura de plus en plus, des questions qui fâchent et j'ai souvent vu des soigneurs s'énerver parce que totalement coincés par la logique implacable du visiteur... Et entre ce que le gentil lémurien mange le matin et un point de vue sur l'euthanasie des surplus, le grand écart est complexe à gérer...

[Philippe]

Et le "sujet" dont on parle, qui est bien la connaissance des pensionnaires du parc, ils ne peuvent, rien que pour cette raison, bien le connaître...

Les panneaux apposés devant les enclos indiquent le nombre d'individus, leur âge et leur provenance et précisent comment les distinguer lorsque c'est possible... Les animateurs peuvent donc élargir le sujet de leur discours.

[didier]

Franchement, s'il y a un parc où j'ai toujours obtenu des réponses à mes questions, parfois même de la bouche de son directeur Patrick Jardin, toujours présent sur le site, c'est bien Nesles.

[gibbon]

Et le "sujet" dont on parle, qui est bien la connaissance des pensionnaires du parc, ils ne peuvent, rien que pour cette raison, bien le connaître...

Les panneaux apposés devant les enclos indiquent le nombre d'individus, leur âge et leur provenance et précisent comment les distinguer lorsque c'est possible... Les animateurs peuvent donc élargir le sujet de leur discours.

Oui sur l'histoire naturelle des animaux, les problèmes environnementaux, etc., mais sur les pensionnaires du zoo, ils n'ont pas grand-chose si ce n'est rien à dire de plus que sur les panneaux. Le rôle des animateurs est potentiellement intéressant, mais les visiteurs les détournent des sujets importants, et si on tend l'oreille pendant sa visite, on se rend compte qu'ils se focalisent avec leurs questions sur les animaux du parc et très peu sur leurs congénères sauvages. Et c'est là le problème: ils mettent peu en pratique leur potentiel pédagogique et ils passent beaucoup de temps à parler de sujets que les soigneurs connaissent beaucoup mieux.

[Philippe]

Peut-être Gibbon ou peut-être pas, .
A dessein, les animateurs ne s'attardent pas trop longtemps auprès des visiteurs afin d'en sensibiliser le plus grand nombre. Dès lors, le fait qu'ils connaissent - éventuellement et pour certains seulement (car le parc compte aussi des permanents) - moins bien les pensionnaires que les soigneurs ne me paraît pas gênant et peut même être perçu comme un atout. En effet, cela évite l'écueil de la personnalisation et favorise, par la force des choses, un discours plus général et plus en phase - à mon sens - avec la mission pédagogique des zoos.

[Vinch]

Franchement, s'il y a un parc où j'ai toujours obtenu des réponses à mes questions, parfois même de la bouche de son directeur Patrick Jardin, toujours présent sur le site, c'est bien Nesles.

Pour celui qui veut, c'est pratiquement possible dans tous les parcs zoologiques français.
Je dirais tout de même qu'il est vrai qu'à LVDS, Doué, et le CERZA ( du temps des deux frères Jardin, puis du temps de Thierry Jardin. Je n'ai pas encore visité Nesles), les directeurs ont toujours été d'une très grande disponibilité et avec le sourire.

[gibbon]

A dessein, les animateurs ne s'attardent pas trop longtemps auprès des visiteurs afin d'en sensibiliser le plus grand nombre. Dès lors, le fait qu'ils connaissent - éventuellement et pour certains seulement (car le parc compte aussi des permanents) - moins bien les pensionnaires que les soigneurs ne me paraît pas gênant et peut même être perçu comme un atout.

... certainement et pour la plupart... Car en saison, qui correspond au moment où l'affluence des visiteurs est énorme, les saisonniers sont bien plus nombreux que les permanents.

En effet, cela évite l'écueil de la personnalisation et favorise, par la force des choses, un discours plus général et plus en phase - à mon sens - avec la mission pédagogique des zoos.

Oui, mais faut-il le répéter, malheureusement le gros des visiteurs s'en moque royalement!