Ardent défenseur des animaux, le comte Paul de la Panouse est à l'origine du parc animalier de Thoiry (Yvelines), véritable théâtre de la nature.
Âgé de 75 ans, le comte de la Panouse, Paul, ne s’occupe plus directement du parc animalier situé à Thoiry (Yvelines) mais habite toujours le château, formidable bâtisse construite en 1 559. Un lieu magique et mystique dont il connaît désormais tous les secrets, même les mieux gardés.
L’endroit est, il est vrai, remarquable. Sa construction repose sur le nombre d’or et la géométrie sacrée. Le résultat est à l’image du mystère : au solstice d’été et au solstice d’hiver, le soleil se lève et se couche à travers le vestibule. Le phénomène est alors remarquable : le château devient le pivot d’un calendrier solaire dont l’horizon est le cadran et les aiguilles les axes de transparence des fenêtres. De quoi exciter les curieux de tout poil. Ils se retrouvent chaque année ici pour des cérémonies privées empruntes de rituels pour le moins sacré…
400 000 pages d’archives
Catholique de tradition, le comte tient tous ces personnages énigmatiques en haute estime. Lui-même n’est pas franc-maçon mais il partage les valeurs de la confrérie humaniste. « Le château offre un outil aux personnes qui souhaitent être en harmonie avec les proportions et les forces fondamentales de la nature. Cela peut être une quête personnelle ou bien le fait de s’appuyer sur les traditions des compagnons, des francs-maçons ou des druides. Tout cela dans un seul but, le contrôle de la beauté. Cela n’a rien de magique. »
Le mystère plane néanmoins sur l’une des deux bâtisses familiales du comte. Un mystère aujourd’hui dévoilé par ce passionné de théologie à force de recherches à travers 400.000 pages d’archives !
La réserve africaine
À Thoiry tout se tient, tout est lié. Des siècles de tradition quasi monarchique mais également révolutionnaire – la famille est vaste et variée – ont fait du domaine ce qu’il est aujourd’hui. Un fantastique patrimoine tardivement classé au patrimoine des monuments historiques car le bâtiment se fait vieux. Il faut bien l’entretenir. D’où l’ouverture au public au début des années 60 pour couvrir les menus frais. « En ouvrant le château au public, nous lui avons donné une fonction sociale. » Mais les visiteurs se sont faits rares. « J’ai créé la réserve africaine comme un rêve de la fin du XXe siècle. Il n’y avait pas assez de visiteurs, les revenus des fermes ne suffisaient plus, il fallait trouver une solution : c’était soit le parc d’attractions, soit les animaux. »
« Seul Jean Richard nous a aidés »
Le comte de La Panouse a finalement fait les deux en créant, sur les 400 ha de terrain à disposition, le premier safari zoo de France. Il met « les animaux en liberté et les visiteurs en cage ». L’idée, il en est persuadé, était dans l’air du temps. S’il ne l’avait exploitée, d’autres l’auraient fait à sa place, ailleurs. Mais que ce fut dur. « Nous avions tout le monde contre nous, seul Jean Richard, qui avait la Mer de sable, nous a aidés. »
Nous sommes en mai 1968, le 12 mai, et le concept, bientôt soutenu par les syndicalistes de la CGT pour alimenter le parc en essence, fait aussitôt un tabac. Un succès qui se s’est jamais, ou presque, démenti. Le parc a, il est vrai, su se renouveler en collant à l’air du temps sans jamais faire n’importe quoi. Cette année par exemple, des lanternes chinoises se sont implantés avec succès durant la saison hivernale. Là encore un succès : 100 000 visiteurs sont venus apprécier le spectacle. Il sera reconduit l’an prochain. « Nous avons depuis l’ouverture accueilli 23 millions de visiteurs et surtout poursuivi l’œuvre d’une famille qui essaie de s’adapter à chaque génération. En montant à bord, les animaux sauvages ont sauvé les châteaux. Nous, nous nous sommes ouverts sur la faune de tous les continents. »
« Il y a une éthique »
Ce rêve animalier regroupant pour la première fois de nombreuses espèces africaines au même endroit en Europe n’est pas non plus venu par hasard. « Je suis né à la campagne. J’ai appris à traire une vache à 7 ans… » Une passion du terroir et de la ferme désormais au service des animaux du monde entier. Rapidement, 800 à 1.000 grosses bêtes et des centaines de plus petites trouvent à Thoiry un lieu pour vivre en paix dans un milieu préservé. Pour le public, c’est un lieu unique, le seul à posséder en France un tunnel de verre à demi enterré pour admirer les lions ! Le tout sous le contrôle de la plate-forme ESA (épidémiosurveillance en santé animale), la structure européenne responsable de 370 programmes de protections des animaux. « Il y a une éthique. On ne fait pas n’importe quoi, et surtout pas du cirque. Dans les parcs animaliers affiliés, nous ne pouvons présenter au public que des activités liées au nourrissage ou au médical training. »
Ainsi, le parc a dû faire stériliser ses pandas roux, devenus une menace pour l’espèce car trop fertiles ou bien a dû se séparer de son dragon de Komodo, qui avait pourtant longtemps fait sensation. « Le climat était trop sec. Nous aurions aussi pu avoir les pandas de Beauval mais ma fille n’a pas voulu car il fallait les louer. Elle n’a pas voulu non plus des tigres blancs, qui n’existent pas dans la nature. »
L’éthique au cœur du concept, c’est aussi cela la tradition de la famille.
Nouvelle génération
Aujourd’hui, alors que le parc de Thoiry a des ramifications multiples, avec notamment un projet de parc animalier en Côte d’Ivoire, la gestion d’un parc à Porto et participe au développement de plusieurs parcs en France, une nouvelle génération a pris les commandes du domaine et des affaires familiales.
Edmond, le fils, et Colomba, la fille, s’impliquent totalement. Ainsi, Colomba a développé l’arche des petites bêtes, un espace pour les invertébrés batraciens en difficulté très apprécié des enfants. Elle a aussi monté une usine de méthanisation. Celle-ci permet aujourd’hui d’alimenter en gaz de ville huit villages et une partie de la ville de Plaisir. Récemment encore, 250 tonnes de fumiers en provenance du salon de l’agriculture sont arrivées sur site pour alimenter le réseau gaz de ville. « Nos deux enfants reprennent nos objectifs avec le langage de leur génération, se réjouit le comte de la Panouse. L’objectif est de doubler la production d’ici trois ans. »
Toujours implanté au sommet de la colline, le château de Thoiry (Yvelines) reste aujourd’hui un temple unique dédié au soleil, à l’homme mais aussi aux animaux du monde entier et de plus en plus à l’écologie.
Source : 78Actu.Paul de La Panouse et son fils Edmond sur le parvis du château.
A cette époque, Jean Richard possédait également son propre zoo dans sa propriété d'Ermenonville.