Le muséum de Besançon se mobilise pour les lémuriens

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Le muséum de Besançon se mobilise pour les lémuriens

Messagepar Philippe » Vendredi 16 Juin 2017 10:48

A Besançon (Doubs), le museum de la citadelle est mobilisé pour sauver les lémuriens

Plusieurs espèces rarissimes de ces primates endémiques de Madagascar sont présentées à titre conservatoire au parc zoologique bisontin.

La cage est petite, le sol recouvert de copeaux de bois. Carole Jousset, soigneuse au parc zoologique de Besançon, y pénètre en parlant à haute voix, « pour prévenir Veloma » de son intrusion. Mais Veloma n’est pas là. Elle s’est installée au soleil, dans la partie extérieure de son refuge.
La soigneuse l’appelle, en présentant devant le soupirail un petit plateau composé de céleri, fenouil et quelques pousses de bambou. Après de longues minutes, une petite tête noire et brune apparaît enfin. Ses deux grands yeux marron balayent la cage. Encore une hésitation et Veloma se résout à rentrer, renifle son plat et empoigne sans grande conviction une branche de céleri.
« Elle a été opérée il y a quelques jours. Elle se remet doucement », justifie Carole Josset qui suit avec la plus grande attention l’état de santé de cette femelle grand hapalémur. Et pour cause. Pendant près d’un siècle, la communauté scientifique a considéré que cette espèce de lémuriens avait totalement disparu de la surface de la terre. Jusqu’en 1986, l’année où a été découverte une colonie d’une cinquantaine d’individus dans une forêt primaire isolée de Madagascar. Depuis, la communauté internationale s’est mobilisée pour sauver ce petit primate.

En Europe, Sorja, disparue en avril dernier au muséum de Besançon, a longtemps été le cœur vivant de cette renaissance. « Sur la vingtaine d’individus vivant en captivité en Europe, six sont des descendants directs de Sorja. Et plus de 120 lémuriens sont nés ici depuis 1985 », précise Mélanie Berthet, vétérinaire au muséum.

Spécialisé dans la conservation des espèces menacées, le parc bisontin s’est taillé une solide réputation dans la préservation des lémuriens. Jusqu’à sept espèces rares ont été présentes à la citadelle. Souvent avec d’excellents résultats en termes de reproduction. Prenez le makis varis (une autre variété de lémurien). Et bien, la moitié de la population européenne est née dans la capitale comtoise.

Ce travail de terrain, nourri d’observations quotidiennes, a permis de notables avancées dans la connaissance des petits primates. C’est ici par exemple qu’a été établie, de façon quasi infaillible, une méthode pour connaître les périodes de fécondité des femelles et donc de leur mise bas. Comment ? « En observant la dilatation de leur vulve », indique Mélanie Berthet, qui a également participé avec ses équipes à la mise en place d’un protocole pour nourrir au biberon les propithèques couronnés que leur mère avait tendance à abandonner en captivité. Et il a fallu pour cela mettre au point un lait artificiel, en mélangeant du lait pour bébé, du lait pour chat et de l’eau minérale ! C’est également à Besançon que l’on a découvert que les lémuriens avaient des teneurs en calcium dans le sang anormalement élevées. « Mortelle pour la plupart des animaux, mais que la physiologie du petit primate de Madagascar permet de digérer. »

« La sauvegarde de la nature est vitale pour l’économie malgache »

Ces découvertes ont fait l’objet de publications dans des revues scientifiques ou dans des actes de conférence qui participent à une meilleure connaissance de l’espèce. Mais pas seulement. Les naissances sont essentielles pour la pérennité de ces animaux grandement menacés. « Cela permet des échanges avec d’autres parcs pour éviter la consanguinité », rappelle Mélanie Berthet. Mais aussi de sensibiliser l’opinion à la cause des lémuriens pour récolter des fonds. Car le but ultime est bien de préserver les populations in situ, à Madagascar.
Le muséum de Besançon est donc partie prenante dans trois associations qui œuvrent sur le terrain. Et depuis 2008, ce ne sont pas moins de six missions auxquelles l’institution bisontine a participé. Et il y a urgence. Chaque année, 200.000 hectares de forêt disparaissent sur l’île rouge. À cause notamment de la culture sur brûlis et du pillage anarchique des bois précieux. Conséquence, l’habitat des lémuriens est de plus en plus morcelé. Et les populations éparpillées.

Sur place, le premier travail des ONG consiste à capturer et transporter les animaux isolés vers des secteurs encore préservés, mais aussi à former des Malgaches à la préservation. « On travaille également à la création de pare-feu pour éviter la propagation des feux de brousses qui grignotent la forêt. On essaye aussi de faire comprendre aux populations que les lémuriens sont des espèces rares, uniques au monde, qui peuvent aussi leur apporter du travail. Actuellement, l’une des activités générant le plus de revenus à Madagascar, c’est l’écotourisme. La sauvegarde de la nature est donc vitale pour l’économie », explique Mélanie Berthet. Un discours forcément difficile à faire passer dans un pays où 92 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, avec moins de 2 dollars par jour et par personne.

Il n’empêche, à l’instar des ours blancs sur la banquise, les lémuriens sont aujourd’hui en péril. Environ un quart d’entre eux sont déjà en danger critique d’extinction. Et la plupart des autres sont sur la liste rouge des espèces menacées publiée par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).
Bref, la situation est urgente. Et si la déforestation continue au même rythme, il n’y aura plus de lémuriens dans moins d’un quart de siècle. C’est pourquoi les ONG environnementales ont décidé de lancer un plan de sauvetage en faisant appel à des fondations privées. Mais sans l’État malgache, qui n’a pas les moyens de mettre la main à la poche pour sauver son principal ambassadeur.


Madagascar, un sanctuaire d'une grande valeur patrimoniale

Madagascar ne constitue que 0,4 % de la planète, mais 20 % des primates s’y trouvent. On y recense aujourd’hui 103 espèces et sous-espèces de lémuriens. De fait, la grande île du sud africain est le deuxième pays au monde pour la diversité des primates après le Brésil, mais le seul à abriter des populations de lémuriens à l’état sauvage. Selon les chercheurs, on serait encore loin de connaître toutes les espèces de ces petits primates qui ont évolué séparément des singes africains depuis des millions d’années.

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Source : L'Est Républicain.
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Philippe
 
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Re: Le muséum de Besançon se mobilise pour les lémuriens

Messagepar Philippe » Vendredi 16 Juin 2017 10:54

Au chevet des espèces menacées

Langurs de François, lions d'Asie, tigres de Sibérie, aprons du Rhône, le museum de la citadelle de Besançon est engagé dans de nombreux programmes de conservation animale.

Ne cherchez pas de girafe ou d’éléphant au parc zoologique de Besançon, il n’y en a pas. Ou plutôt, il n’y en a pas plus. Il y a une dizaine d’années, ce petit zoo de 3 hectares perché au-dessus de la capitale comtoise s’est spécialisé dans la conservation des espèces menacées et en danger d’extinction.
« Une situation qui concerne les trois quarts des animaux que nous présentons », assure-t-on au muséum. Le visiteur peut donc y voir un couple de langurs de François, un primate originaire de Chine, des sangliers de Visayas, originaires des Philippines, des ibis chauves, des gibbons du Laos, mais aussi des lions d’Asie et autres tigres de Sibérie… Bref, tout ce que vous ne verrez pas ou peu dans un zoo classique. En captivité, ces animaux parviennent pour la plupart à se reproduire, ce qui permet d’alimenter d’autres centres de conservation en maintenant un brassage génétique indispensable à la préservation de chaque espèce.

Seul un animal fait ici l’objet d’un plan expérimental de réintroduction. Il s’agit de l’apron du Rhône, un poisson présent uniquement sur le fleuve rhodanien et ses affluents, le Doubs et la Loue, notamment. Selon les estimations, il n’y aurait plus qu’environ 12.000 individus de cette espèce. « Ce qui en fait le poisson le plus menacé de France », assure Mickaël Bejean, le responsable aquarium et élevage du muséum, qui gère également une écloserie et un centre d’élevage pour apron, unique en France. Aussi, depuis 2008, le muséum a relâché 25.000 alevins dans la Drôme.
« Le programme de réintroduction est prévu jusqu’en 2018. Ensuite, il y aura deux années d’évaluation. Si le bilan est positif, le programme sera poursuivi sur d’autres cours d’eau », précise Mickaël Bejean, qui pourrait bien avoir à piloter un autre projet du genre, avec l’écrevisse des torrents cette fois. Ce petit crustacé, victime de l’aphanomycose, une maladie véhiculée par l’écrevisse américaine, n’est plus présent en France que dans deux ruisseaux du nord de l’Alsace.

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Source : L'Est Républicain.
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