Du coq à l'âne

[Philippe]

Sans doute le "cadre" de la présentation est-il important mais la magie peut aussi opérer dans des enclos dont le biotope n'est pas forcément reconstitué. Des lions dans un vaste enclos avec des peupliers, cela ne me semble pas un souci, même si nous sommes loin du biotope d'origine.
Quant à l'abondance de parcs, elle demeure souhaitable à mon sens dès lors qu'on raisonne en terme d'élevage ex-situavec l'obligation de conserver une diversité génétique minimale. Et ce n'est pas parce que dix parcs français de plus présenteraient des gorilles que cela nuirait à la sensibilisation du public à l'endroit de cette espèce. Il se peut même que cela soit le contraire et que précisément trop peu d'espèces menacées soient présentées dans certains parcs au bénéfice d'espèces non menacées comme les dromadaires ou les lamas...

[okapi]

C'est une problématique de fond: je ne crois qu'il soit nécessaire de multiplier les parcs, mais il faudrait mieux accompagner certains zoos mal développés et qui ont de forts potentiels. Et je ne crois pas non plus que la diversité génétique passe par le nombre de zoos: des sanctuaires non ou peu accessibles au public serait infiniment plus efficaces que dix enclos moyens dans dix parcs pour de nombreuses espèces. Enfin, c'est une évidence que les parcs ne présentent souvent que des espèces inutiles ou en préoccupation mineure plutôt que des espèces en danger critique... Si les plans de collection étaient revus à l'aune de la seconde catégorie, la plupart de nos zoos seraient vides...

[Philippe]

Des sanctuaires non ou peu accessibles au public, l'idée est évidemment excellente : reste le problème du financement et donc des fonds récoltés pour la sauvegarde des espèces. Retour au problème initial et du serpent qui se mord la queue...
Elever une espèce menacée au sein de divers établissements présente aussi l'avantage d'éviter le risque d'une catastrophique épizootie au sein d'un sanctuaire qui abriterait seul la majorité des spécimens de l'espèce. Donc que les parcs, améliorés, restent assez nombreux comme c'est le cas aujourd'hui me semble toujours une bonne chose.
L'autre question de fond soulevé par mon précédent post n'appelle sans doute pas non plus de réponse simple. Certaines espèces peu menacées attirant le public, faut-il les conserver puisqu'elles présentent cet atout pour des parcs ayant besoin de rentrées financières ou les délaisser au risque finalement de ne plus pouvoir héberger des espèces qui le nécessitent ? Je ne suis pas persuadé qu'il existe sur ce point une réponse tranchée et définitive mais bien plutôt des façons d'agir, de présenter les animaux, bref de mettre en oeuvre des actions pédagogiques permettant d'atteindre l'objectif visé, à savoir la sauvegarde des espèces en danger.
Maintenant, certaines structures pourraient aussi avoir mission d'accueillir des spécimens d'espèces menacées ne présentant plus d'intérêt génétique au sein d'enclos adaptés : ce pourrait être le cas de certains parcs municipaux par exemple aux moyens limités (ce serait à la fois utile pour la gestion ex-situ de l'espèce et éventuellement efficace en terme de sensibilisation du grand public, voire de particuliers compétents.

[okapi]

Le mot clé est "élever": détenir un couple qui ne se reproduit pas ou peu, souvent pour un espace mal conçu ou trop exposé au bruit, n'est pas vraiment un élevage... Il y a un vrai malentendu dans cette idée d'un zoo incubateur, alors que dans de nombreux parcs ce sont les lamas, les chèvres naines et les cochons d'Inde qui se reproduisent avec régularité. Le ratio espèces rares/naissances régulières n'est pas si efficace et la création de plusieurs sanctuaires hors public est considérée comme une bien meilleure solution. Les parcs devraient se donner cette responsabilité et financer à plusieurs un espace protégé, alimenté par des fonds variés et notamment par le produit des recettes apportées par les lamas, dromadaires, etc...

[Panda21]

Il y en a déjà un de sanctuaire peu accessible au public et qui doit sans doute avoir des financements extérieurs importants, c'est la Haute-Touche.

[raphaël]

N'oublions pas non plus que peu d'espèces nécessitent la création de grands élevages ex situ, qu'ils soient dans les zoos ou dans des "sanctuaires fermés au public".
Pour beaucoup c'est un milieu qui disparait, et donc un espace à maintenir plutôt qu'une augmentation du nombre d'individus.
On connait tous la belle histoire de la roussette de Rodrigue, quasiment disparue sur l'île de Rodrigue dans les Mascareignes, et dont Gerald Durrell en personne préleva une quinzaine d'animaux pour reproduire à Jersey, tout en lançant un programme de conservation sur place. Une fois les individus captifs reproduits.... Et bien les individus libres s'étaient également reproduits en nombre ce qui a rendu inutile toute réintroduction.

Et même si les zoos peuvent créer des colonies d'élevage pour beaucoup de petites espèces (reptiles, amphibiens, oiseaux), aucun établissement, que ce soit un zoo ouvert au public ou un parc fermé comme en rêve okapi, ne pourra se lancer dans l'élevage industriel de gros animaux menacés (tigres, rhinocéros, ours...).
Je pense que des parcs comme Jersey, Doué ou La Vallée des Singes montrent bien que le rôle d'un zoo est multiple : oui ils peuvent servir d'élevages de populations ex situ, mais ils sont aussi utiles dans l'éveil des consciences du public, et peuvent apporter un soutien logistique et financier aux réserves naturelles in situ.
Des sortes de sanctuaires inaccessibles du public, ça ne marcherait pas non plus pour toutes les espèces, et ça serait totalement opaque aux yeux du grand public, ce qui est quand même dommage.

[okapi]

La Haute Touche est un bon compromis entre zoo et sanctuaire, mais c'est un établissement public, dépendant du Muséum, donc de l'Etat. Il ne reçoit que les fonds nécessaires à son fonctionnement et épisodiquement de petits moyens pour améliorer l'existant. Avec plus de 600 hectares, il y aurait de quoi faire, effectivement. Très objectivement, la notion d'élevage industriel est à relativiser, néanmoins, sur quelques centaines d'hectares, il y a de quoi faire en mutualisant les ressources et en implantant des groupes et des troupeaux pour certaines espèces, des enclos vastes et discrets pour quelques dizaines de couples d'une même espèce... En découpant une dizaine de parcs de 300 ou 400 hectares d'un bout à l'autre du territoire, soutenus financièrement par les zoos proches et des fonds publics, il y aurait de quoi mettre en place des élevages un peu plus sérieux que les volières stériles ou les enclos mal adaptés de nombreux parcs.

[Philippe]

Mais au final, dans cette dizaine de parcs, combien d'espèces estimerais-tu raisonnable d'élever ? Et, pour la diversité génétique des espèces et prévenir tout risque d'épizootie, il faudrait aussi que cela ne mettre en place parallèlement dans les autres pays européens.

[okapi]

En croisant les ressources, notamment en termes d'espace et de climat, une centaine d'espèces devraient pouvoir être élevées de manière rationnelle, avec un minimum d'intervention humaine et une bonne diversité génétique, surtout si on élargit l'expérience à l'Europe. Le risque est d'être dépassé par le succès et d'être incapable de gérer des populations trop dynamiques: ce qui revient à questionner la logique de reproduction dans les parcs puisqu'à un moment donné, il y aura surpopulation dans les zoos et impossibilité de réintroduire...

[didier]

Autre piste : les parcs thématiques , pour moi la Vallée des Singes et le Parc des Félins sont les 2 établissements qui apportent les meilleures conditions de vie à leurs pensionnaires . Ils connaissent un certain succès populaire , je suis étonné que ce concept ne soit pas envisagé dans d'autres régions .

[Therabu]

J'appprécie aussi énormément le concept mais singes et félins sont clairement deux classes zoologiques attractives pour le grand public. J'attend le parc spécialisé sur les amphibiens ou les rongeurs.

[okapi]

Amphibiens et rongeurs pourraient faire l'objet de zones spécialisées au sein d'un parc généraliste ou semi-généraliste. Pensez-vous qu'il y ait la place pour une seconde Vallée des Singes ou un autre Parc des Félins?

[Panda21]

Bien sur qu'il y a la place mais au moins à 500 km de distance car je ne vois pas l'intérêt de faire deux parcs similaires sur un rayon de 100 kilomètres. J'aimerais bien visiter un parc spécialisé dans les primates, mais Romagne est inaccessible pour moi comme pour toute la façade est, sauf si on est en vacances dans le coin

[didier]

Ozoir offrirait un cadre idéal pour une Vallée des Singes bis et succès populaire garanti . Je pense que les singes sont plus attractifs que les félins , je me rappelle avoir vu un monde fou à la montagne des singes en Alsace pour voir 200 magots (ou moins ?) dans quelques hectares de forêt . Le parc des félins version Auneau attirait moins de 30 000 visiteurs , en se déplaçant en région Parisienne , il a multiplié par 10 sa fréquentation , normal dans une région où vivent 12 millions d'individus . Il reste tout de même un parc plus compliqué pour le visiteur de base : les félins ronflent 90% du temps et même lorsqu'ils sont actifs , la taille des enclos fait qu'ils ne sont pas toujours visibles . L'île des lémuriens et les tigres blancs sont là pour compenser un peu la frustration de ces visiteurs , toutefois dans sa configuration actuelle , je pense que la fréquentation devrait se stabiliser autour de 300 000 visiteurs .

[Panda21]

Le problème avec les félins c'est que t'as vite fais le tour. Dur d'avoir des chats à tête plate ou des Andes. Alors que pour les singes, tu peux proposer de la nouveauté tous les ans sans grande difficulté.