Questions de scénographie

[okapi]

Du grec σκηνη (skene) scène et γραφειν (graphein) écrire), la scénographie désigne l'art de l'organisation de l'espace scénique. A l'heure où la fréquentation est déterminante pour l'équilibre des finances d'un parc zoologique privé, que pensez-vous de cette surenchère à la scénographie dans l'organisation et la conception des enclos? Pour être très clair, le meilleur exemple de scénographie maîtrisée est probablement Masoala. Il n'y a pas beaucoup d'espaces zoologiques aussi bien "écrits" que ce parcours à l'intérieur d'une serre où tout est fait pour plonger le visiteur dans un ailleurs plus vrai que nature, mais qui reste totalement illusionniste. Pour mémoire, les palais et les temples de Pairi Daiza ne relèvent pas du domaine de la scénographie dans une perspective purement zoologique, mais ils composent avant tout un habillage parfaitement artificiel et extrêmement séduisant pour le visiteur moyen. L'idée qui conditionne le développement d'un enclos est l'élément principal et c'est là que la justesse de l'écriture et de la scénarisation sont cruciales. Pensez-vous que cette tendance est néfaste où, au contraire, intéressante et sans doute inévitable?

[abel]

Je dois avouer que je n'y connais pas grand-chose en scénographie, donc mon opinion est simple: la scénographie dans un parc zoologique (privé ou pas, d'ailleurs), c'est probablement inévitable, et ça peut être intéressant, bien sûr, mais à condition que ça n'empiète pas sur ce qui reste primordial: le bien-être des animaux. Les dernières réalisations de Pairi Daiza, comme le temple des tigres blancs, sont superbes d'un point de vue scénographique, mais malheureusement, cette scénographie se fait de plus en plus au détriment des animaux.
Personnellement, j'adore les parcs qui ont un superbe site naturel, bien mis en valeur, mais je ne sais pas si on considère que c'est de la scénographie.

[okapi]

Là où c'est amusant, c'est que le "bien être" des animaux concernés par un espace zoologique est explicitement conditionné par la scénographie du lieu de vie... Concevoir un espace, c'est faire des choix, en fonction du site, de sa topographie, de sa taille, de sa forme, des éléments qui le composent ou qui en sont absents, mais aussi du sens que l'on souhaite lui donne et du sens qu'il devra avoir en fonction de la zone où il se trouve en particulier et du parc au sein duquel il est conçu de façon globale. Mais, c'est avant tout pour créer un espace de vie conforme aux besoins de ses occupants: un point d'eau, de l'ombre, du sable ou de l'herbe, des arbres pour grimper ou se balancer, des buissons pour se dissimuler et l'intégration intelligente d'un pavillon ou de loges de nuit, visibles et volontaires ou invisibles par décision pour garder l'aspect "naturel" de l'espace. Rien n'est anodin et la carence quasi généralisée en la matière (manque d'imagination, de réflexion, d'analyse, de conception) est bien la donnée la plus triste dans nos parcs. Encore une fois, les temples et pagodes de Pairi Daiza n'ont rien à voir avec la scénographie des espaces zoologiques proprement dits: ces édifices sont l'identité visible du parc, ils contribuent à en assurer le sens et l'image, ils relèvent du domaine de l'architecture, mais les enclos proprement dits sont une autre histoire. Scénographier un espace de vie, c'est lui associer une narration: qu'est-ce que le visiteur perçoit au premier coup d'oeil, qu'est-ce qu'il découvre au second, comment s'organisent les différents éléments qui le composent, leur hiérarchie et leur réalisation, l'harmonie et l'organicité de l'ensemble: la position d'un bassin n'est jamais anodine, les différents plans livrent des points de vue, conditionnent et orientent le regard du visiteur...

[JEROME31]

Bien dosé, sans exagérations, adapté à une thématique donnée, laissant la part belle aux principaux intéressés ne me pose aucun problème.

Un exemple intéressant est "Te Wao Nui Auckland zoo". Un juste équilibre, bons volumes de volière, population ciblée, Pédagogie... Le tout scénographié mais juste ce qu"il faut pour permettre aux visiteurs de s'immerger sans que cela ne prenne le dessus.
Il faut aussi que cela vieillisse bien et que la patine du temps embellisse le site.





Je suis plus dubitatif concernant les présentations en serre. Souvent c'est la surenchère en faux artifices. Le Masaola est un bon exemple de réussite, une réelle immersion etc... Il y a un restaurant et une boutique, mais non exposés en pleine serre comme au Gondwanaland.





Il faut quand même remarquer que les nouveaux "exhibits" construits ces derniers temps, en Europe où ailleurs, passent par cette obligation. Le public est demandeur de ce type de présentation. Moi le premier, je peux sans difficulté me laisser porter par un décor. Mais encore une fois, sans trop et surtout adapté.
Mais je ne suis pas un bon exemple, pour avoir eu cette discussion avec des collègues de boulot, on se rend compte que notre œil de visiteur est biaisé.