Rapport hebdomadaire de mon stage 2008/2009 au Sharjah Desert Park
1er au 7 février 2009 - Semaine 12

La conférence de conservation débute la semaine prochaine et il ne nous reste plus que quelques jours pour terminer tous les préparatifs nécessaires. Cette année, celle-ci aura lieu dans un hôtel de Sharjah et non pas au Sharjah Desert Park. Cela facilite et complique tout à la fois son organisation ; l'intendance, telle que la préparation des boissons pour les pauses, n'est plus à notre charge, mais nous aurons à effectuer le trajet en voiture vers le centre de Sharjah tous les jours et il faudra nous assurer d'avoir sur place tout le matériel nécessaire. En attendant, au BCEAW, nous réinstallons la salle de réunion, en chantier depuis plusieurs semaines suite à un incendie mineur l'automne dernier. En fin de journée, Björn et moi allons installer, comme la semaine passée, des pièges dans le désert. Nous utilisons cette fois de la pâte à tartiner Nutella comme appât et espérons avoir plus de résultat que la dernière fois !

Lundi matin, nous allons relever nos pièges dans le désert et avons la surprise de découvrir quatre gerbilles naines (Gerbillus nanus). Sur neuf pièges installés, c'est un bon résultat. Le Nutella a-t-il eu un rôle à jouer ?! Nous observons aussi de nombreuses traces de présence de petits animaux tout autour dans cette zone. Nous retournons au BCEAW pour mettre en quarantaine les quatre gerbilles. C'est un peu difficile pour moi de mettre en captivité ces quatre petits rongeurs, qui vivaient encore il y a quelques heures dans ces immensités désertiques, mais je sais que cela est effectué dans un but de reproduction de lignées captives en vue de futures réintroductions, tout à fait envisageables dans la région pour de tels animaux. Au moment de la mise en quarantaine, nous déposons sur le pelage des animaux quelques gouttes d'une solution antiparasitaire et vérifions le sexe des nouveaux arrivants. Nous avons été chanceux, il s'agit de deux femelles et de deux mâles !

A 9h, j'accompagne toute l'équipe à la Children's Farm pour participer à la capture de trois daims communs. Un système ingénieux de capture et de contention est utilisé ici pour la majorité des ongulés. Il s'agit de pousser l'animal dans un long couloir, séparé en différents compartiments fermé au fur et à mesure de la progression de l'animal, et menant jusqu'à une structure de contention aux parois amovibles. Une fois l'animal dans cette structure, les parois latérales sont rapprochées et le plancher est libéré, bloquant l'animal dans une sorte d'entonnoir où ses mouvements sont très limités. Il suffit de maintenir l'individu dans cette position et de nombreuses manipulations sont ainsi possibles, telles que vaccination, prise de sang, marquage, parage des sabots...

De retour dans les bureaux, je continue la préparation de la conférence et grave les futurs CDs contenant les Briefing Books, qui seront distribués aux participants. Les journées s'allongent et la température augmente, en particulier en milieu de journée. Le court hiver est maintenant terminé et l'été avec ses fortes chaleurs s'annoncent déjà !

Mardi, je réceptionne enfin les quelques exemplaires imprimés des Briefing Books. Ces manuels, qui compilent les articles et documents en relation avec la présence et le statut de nombreux limicoles et oiseaux aquatiques dans la Péninsule Arabique, serviront de référence lors de l'évaluation du statut de conservation de ces espèces. J'essaie le matériel informatique que nous utiliserons lors de la conférence, en particulier les ordinateurs portables et les projecteurs. Comme tous les mardis, l'Arabia's Wildlife Centre est fermé au public et je profite de ma pause de midi pour effectuer à nouveau quelques photographies. Je vais aussi voir les deux petites hyènes dont s'occupe Christel ; elles grandissent si rapidement ! L'après-midi, la liste des participants à la conférence s'allonge encore et il faut organiser vols, hôtels, visas...

Mercredi, je prépare les badges pour les participants à la conférence. Je vais avec Kevin Budd, le directeur adjoint du BCEAW, à l'hôtel de Sharjah où se déroulera la conférence. Nous vérifions ainsi les salles dont nous disposerons et commençons à imaginer le déroulement de ces trois prochaines journées. Au BCEAW, trois léopards d'Arabie sont nés et d'autres portées sont encore attendues dans les semaines à venir.

Jeudi, je réalise un panneau pédagogique pour la couleuvre à diadème (Lytorhynchus diadema), espèce dont plusieurs individus seront bientôt présentés dans l'Arabia's Wildlife Centre. C'est une espèce délicate, dont la nutrition n'est pas toujours bien maitrisée, mais, après plusieurs années d'expériences dans les coulisses, il est décidé aujourd'hui de mettre quelques individus en présentation. J'effectue aussi quelques photographies pour illustrer le futur panneau. A midi, je profite de la piscine extérieure ; bien que l'eau soit encore froide, il est à nouveau possible de s'y baigner. Après la journée de travail, Paul Vercammen me dépose à l'aéroport de Sharjah où je loue une voiture pour le week-end. Il s'agit cette fois d'une Mitsubishi Lancer grise automatique. Je me dirige dès ce soir vers le Dubai Mall où j'espère pouvoir profiter du Dubai Aquarium & Discovery Centre sans la foule de ma première visite, et effectuer ainsi quelques photographies des lieux. Un spectacle nommé Themed Forest Circus Show est donné dans un des recoins du Dubai Mall et je m'y arrête quelques instants. Je me dirige ensuite vers le Grand Hyatt Dubai, hôtel situé non loin de la crique de Dubai. J'espère pouvoir dîner au restaurant vietnamien Indochine, fortement conseillé par le Lonely Planet. Une fois sur place, j'apprends malheureusement que ce restaurant est fermé depuis bientôt trois ans. Il me reste alors à choisir entre les différents restaurants qui entourent le vaste hall d'entrée du Grand Hyatt où prospère une véritable petite jungle tropicale. Je porte finalement mon dévolu sur The Market Café, surtout pour son intégration dans le cadre végétal même si le menu est quelconque.

Vendredi, je pars à la recherche du fameux drome ardéole (Dromas ardeola), aussi appelé pluvier crabier, étrange oiseau présent dans la région. Paul m'a conseillé de me rendre à Umm Al Quwain où il a régulièrement observé cette espèce. Une fois sur place, je trouve cet Iliouchine IL-76, dont Paul m'a parlé, atterri ici il y a plusieurs années et qui n'a jamais redécollé. C'est à partir de là qu'il faut que j'emprunte une route de traverse non goudronnée. Je suis un peu sceptique avec ma Lancer de location, mais Paul m'a bien mentionné qu'il ne devrait pas y avoir de souci pour circuler dans ce coin avec une voiture de tourisme. En m'approchant de l'estran, habitat particulier des bords de mer, je commence à observer au loin de nombreux flamants roses, des hérons et de multiples petits limicoles. Je continue ma route à la recherche de dromes ardéoles. La voiture s'embourbe soudain dans une zone de sable humide ! Après quelques manœuvres, j'arrive à me tirer de ce mauvais pas. Premier avertissement ! Un peu plus loin, pour poursuivre la route, je dois traverser une zone de boue, qui semble à priori bien sèche. Je m'en assure en marchant à plusieurs reprises sur la zone à traverser. Des traces fraîches de véhicule me rassurent et je m'engage sur la piste... Quelques mètres plus loin, je me retrouve stoppé dans mon élan avec des gerbes de boue volant aux alentours, la voiture s'enfonçant au fur et à mesure dans le sol boueux... J'essaie d'évaluer la situation rapidement et ramasse aux alentours quelques déchets, morceaux de planche de bois et bouts de tuyaux. Je commence à creuser pour libérer les roues, mais rien n'y fait... J'utilise également les tapis de sol pour essayer de redonner une accroche aux roues, mais la voiture se retrouve bientôt poser sur les bas de caisse dans la boue ! Je me décide à appeler Paul pour qu'il me sorte de là avec son véhicule tout-terrain. Quelques minutes après que je lui ai expliqué ma position pour qu'il puisse me retrouver, un jeune pêcheur sud-africain passe à proximité et propose d'essayer de tracter ma voiture. Malheureusement, en traversant la zone de boue pour rejoindre la piste, il se retrouve lui-aussi complètement embourbé, avec son véhicule tout-terrain ! Il ne nous reste plus qu'à attendre Paul... Une quarantaine de minutes plus tard, il arrive déjà et, en quelques instants et quelques manœuvres, nos deux véhicules se retrouvent à nouveau sur la piste ferme. Paul propose de m'accompagner jusqu'à une station service pour regonfler mes pneus et déposer la voiture pour un nettoyage complet. Nous retournons ensuite à Umm Al Quwain, toujours dans l'espoir de voir des dromes ardéoles. L'estran est difficile d'accès, surtout avec toutes ces zones en construction, et un véhicule tout-terrain est plus que nécessaire. Grâce au télescope de Paul, nous observons au loin de très nombreux flamants, hérons, spatules, limicoles divers... mais aucun drome ! Finalement, après plus d'une heure de recherches, et la traversée de plusieurs passages délicats, nous repérons enfin quelques individus de cette espèce si particulière ! Les observer chasser les crabes est un réel plaisir. Je suis également surpris par la diversité, et surtout le nombre d'oiseaux que nous retrouvons ici, mais toute la côte des Émirats Arabes Unis est peu à peu urbanisée et il ne restera bientôt plus d'habitats propices pour toutes ces espèces. Sur la route de retour vers Sharjah, nous nous arrêtons encore dans une zone portuaire pour essayer d'observer des cormorans de Socotra (Phalacrocorax nigrogularis), mais aucun oiseau n'est visible aujourd'hui. A Ajman, un des sept émirats qui constituent les Émirats Arabes Unis, nous faisons une pause au bord d'une lagune où prospèrent flamants, spatules et hérons. Avant de récupérer mon véhicule, je vais encore prendre une petite collation avec Paul dans une galerie marchande d'Ajman. J'apprends qu'une portée de caracals (Caracal caracal schmitzi) est née la nuit dernière au BCEAW ; c'est une première ! C'est étrange de retrouver ma voiture complètement propre, sans aucune trace des aventures de ce matin. Sur la route de retour, je m'aperçois tout de même qu'elle tremble dangereusement dès que je dépasse les 80 km/h. Il doit probablement rester de la boue dans les roulements ! Je dépose mes affaires au BCEAW et me change, avant de repasser à l'aéroport de Sharjah pour récupérer un autre véhicule. Il est déjà tard, mais je décide d'aller visiter Global Village, situé au sud-ouest de Dubai. Je suis pris dans plusieurs kilomètres de bouchons sur l'Emirates Road pour y accéder et ne gare ma nouvelle voiture de location, une Toyota Yaris, qu'à près de 22h. C'est comme si tout Dubai s'était donné rendez-vous ici ce soir, avec tous les parkings surchargés et des foules comptactes. Global Village a été construit selon le concept d'exposition universelle, avec de multiples pavillons représentant chacun un pays ; un parc d'attractions et de multiples stands de restauration complètent les installations. Les pavillons ne sont pas vraiment des expositions à propos de chaque pays, mais plutôt un regroupement de boutiques plus ou moins typiques. C'est surtout une exposition à propos du trafic animalier, inaugurée très récemment au Global Village, qui me mène ici, mais sur le vaste site, parmi les nombreux pavillons et les foules de ce soir, je ne la trouve pas. Personne ne semble non plus être au courant à l'entrée ou dans les stands d'information. Malgré la foule omniprésente, j'essaie de découvrir un peu certains pavillons ; je suis particulièrement surpris par ceux des pays africains, dont les boutiques sont tenues par des personnes originaires de ces pays. Des Africains en costume traditionnel proposent également de poser à leurs côtes pour une photographie... Tout cela a un amer goût d'exposition coloniale ! Global Village dispose également de deux petits vivariums, situés aux entrées 3 et 5. Je les visite, mais suis particulièrement choqué par les conditions de vie des animaux. De plus, les visiteurs ne se gênent pas pour frapper sur les vitres, ouvrir les terrariums et toucher les serpents, hurler dans cette petite salle encombrée... Quelques oiseaux et petits mammifères sont également présentés, dont deux faucons sur perchoir, un hérisson de Brandt (Paraechinus hypomelas) et un hérisson du désert (Paraechinus aethiopicus). Je rentre au BCEAW au milieu de la nuit après une journée riche en aventures !

Samedi est une journée un peu plus calme. Je profite encore de ma voiture de location pour aller passer la journée à Dubai. Après un copieux petit-déjeuner au Lime Tree Cafe à Jumeirah, je retourne au Dubai Mall pour voir une imposante librairie de la chaîne japonaise Books Kinokuniya. Paul m'a conseillé de m'y rendre et je suis en effet surpris par la diversité de leur rayon zoologique, avec, entre autres, une multitude de guides ornithologiques ! Les rayons francophones sont également fournis et j'ai la surprise de tomber sur un ouvrage du Docteur Marie-Claude Bomsel, mis en avant si loin de Paris. Après m'être acheté un nouveau roman, je me dirige vers le Dubai Creek Golf and Yacht Club où se trouve The Aquarium Pacific Seafood Restaurant, un restaurant qui contient un aquarium circulaire. Ce dernier est d'ailleurs géré par l'équipe de l'aquarium du Burj Al Arab. Je suis surpris de découvrir que le restaurant est complètement vide en ce début d'après-midi et manque un peu d'atmosphère, surtout que l'aquarium central n'est pas mis en valeur avec la luminosité du jour et les larges baies vitrées sur la crique voisine. Sur la route de retour vers le BCEAW, je m'arrête à Festival City pour effectuer mes courses alimentaires de la semaine. Une fois tout cela déposé chez moi, je vais rendre mon véhicule à l'aéroport de Sharjah puis suis rejoint par quelques membres de l'équipe du BCEAW. Nous allons tous ensemble manger au Buddha Bar.